Regards sur les TICE
Forum:
vos réactions, vos
expériences
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Les technologies de l'information
et de la communication
pour l'enseignement (Tice)
bouleversent déjà les
pratiques.
Les approches sont diverses.
Aussi, Profession Éducation
donne-t-il la parole à divers acteurs de
l'École et à un
sociologue.
Des enjeux importants se
profilent,les "marchands
d'éducation" sont
déjà sur les rangs.
L'Éducation nationale doit
relever le défi en misant sur l'avenir et en
se donnant les moyens pour la réussite de
tous.
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Pari sur l'avenir
Les nouvelles technologies de l'information et
de la communication pour l'enseignement (Tice)
bouleversent-elles déjà le
système éducatif ? Il est encore trop
tôt pour répondre de façon
précise à cette question et surtout
pour présumer de la relation entre
l'enseignant et l'enseigné. Ce dossier, loin
de se vouloir exhaustif, en est une première
approche, partielle et partiale. En posant la
question des Tice, on peut poser plusieurs
problèmes : égalité des
élèves et des étudiants sur
l'ensemble du territoire en fonction du
degré d'équipement ;
égalité des élèves et
des étudiants entre eux, dans un même
lieu ; formation initiale et continue des
personnels à ces nouvelles technologies ;
maîtrise des outils par les enseignants ;
maintenance et type de personnels qui en est
chargé.
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Les Tice : mythe ou nécessité,
facteur de transformation du métier et du
rapport au(x) savoir(s) ? Faut-il en avoir peur ou
s'en réjouir ? Il y a ceux qui objecteront
que ces nouvelles technologies vont permettre au
marché de s'emparer du système
éducatif. Il y a ceux, comme le Sgen-CFDT,
qui considèrent que c'est une nouvelle
chance pour l'École et que l'enseignant,
dispensateur du savoir, deviendra plus facilement
organisateur du savoir. Il y a ceux qui ne jureront
que par ces outils pendant que d'autres les
voueront aux anathèmes. L'Éducation
nationale a déjà compris une part des
enjeux mais ne s'est pas vraiment dotée de
tous les moyens nécessaires pour
répondre au défi. Ce dossier donne la
parole à des enseignants, mais aussi
à un sociologue. Ils parlent de leur
vécu, de leur approche de l'outil, de ce que
cela a modifié dans leur façon
d'enseigner et dans la façon dont les
élèves ou étudiants
réagissent. Le métier enseignant de
demain se construit aujourd'hui et doit se
construire avec vous !
Michel Debon
Sommaire
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ÉGAUX DEVANT LES
TICE
Lors des journées de l'Observatoire des
zones prioritaires en mai 2000, un des ateliers a
été consacré à
l'utilisation des technologies de l'information et
de la communication pour l'enseignement (Tice).
D'où cette question prégnante :
comment éviter que l'inégalité
scolaire, et ultérieurement dans
l'accès à l'emploi, ne se
développe davantage entre ceux qui ont
accès à l'informatique dans leur
famille et les autres ? Déjà certains
enfants arrivent au CP avec une pratique
informatique, des élèves disposent
chez eux de cédéroms de soutien
scolaire, d'autres utilisent Internet pour
préparer exposés, travaux
écritsÉ D'autant que la pratique des Tice
peut être source de plaisir ou d'exclusion
par la nature même des dispositions,
capacités, envies qu'elle implique, en
particulier :
¥ un travail de plus en plus
abstrait et interactif avec ses
caractéristiques propres : savoir lire
rapidement et globalement une page, respecter un
timing, supporter un apprentissage long, etc.
¥ la gestion de l'abondance, du temps, de
l'espace, de la transparence, etc.
L'École se trouve aujourd'hui devant la
même responsabilité que dans le
passé face à l'absence de livres dans
les familles. Comment contourner l'obstacle ?
¥ en développant des
coopérations dans l'École et en
mettant en place des dispositifs
périphériques (ateliers sur le temps
de midi, après 16h30, pendant les vacances)
avec l'appui des aides éducateurs.
¥ en proposant aux jeunes des activités
multiples, afin qu'ils utilisent les ordinateurs le
plus souvent possible : jeux, recherches sur
Internet, messagerie, construction de pages web,
visio conférences...
¥ en proposant des formations aux parents des
milieux les plus défavorisés afin
qu'ils puissent dialoguer avec leurs enfants.
C'est à ce prix que l'École pourra
prendre toute sa place dans sa lutte contre
l'exclusion et la ségrégation.
Sommaire
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L'EPI
Jean-Bernard Viaud, président de
l'association Enseignement public et
informatique (Epi), répond à
Profession Éducation.
Qu'est-ce que l'Epi ?
Association loi 1901, fondée en
1971, l'Epi regroupe les enseignants
concernés par le
développement de l'informatique et
des technologies de l'information et de la
communication (Tic) en
général dans le
système éducatif, de la
maternelle à l'université.
Elle publie une revue, un magazine
électronique gratuit, des dossiers
thématiques, des logiciels et offre
un ensemble de services en ligne. Elle
vient d'achever un cédérom
"1 000 mots pour apprendre à lire"
et sa bourse de diffusion et
d'évaluation de logiciels est
particulièrement
appréciée.
Site
: http://www.epi.asso.fr
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Pourquoi y avait-il
nécessité de créer
une association ?
L'Epi a été
créée par les premiers
enseignants stagiaires chez trois
constructeurs informatiques. Son premier
slogan a été "l'informatique
est trop importante pour qu'elle soit
laissée aux seuls informaticiens".
En effet, ces collègues ont
rapidement compris que les
problèmes pédagogiques
devaient avoir la priorité absolue
sur les problèmes techniques. La
nécessité d'une association
comme l'Epi, force de proposition et
d'action, n'a cessé de se confirmer
au fil des années. Les enseignants
partageant le même objectif
(utilisation mais aussi enseignement de
l'informatique) et les mêmes
valeurs, doivent pouvoir trouver des lieux
d'échange et de réflexion en
dehors des structures institutionnelles ou
commerciales. Nous considérons que
l'informatique et les Tic, convenablement
maîtrisées, apportent
beaucoup à l'acte d'enseigner et
à celui d'apprendre. Mais à
l'évidence des conditions doivent
être remplies qui ne le sont encore
que très insuffisamment : formation
initiale et continue des maîtres,
évolution des programmes et des
conditions d'enseignement, logiciels
répondant aux besoins réels,
matériels en nombre suffisant et
correctement maintenus,
personnes-ressources dans les
établissements...
Sommaire
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Enseignement
et nouvelles technologies
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Il y a
cinquante ans, on parlait
déjà de technologies
nouvelles. Aujourd'hui, alors qu'elles se
sont largement répandues dans le
système éducatif, on peut se
poser la question de leur banalisation et
de leur apport au savoir et aux
pratiques.
Les
technologies de l'information et de la
communication pour l'enseignement exigent,
pour qu'elles soient vraiment pertinentes
dans un processus d'apprentissage, que
chacun adopte une position critique par
rapport à l'usage qu'il en
fait.
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Quoiqu'on en dise, les nouvelles
technologies ne datent pas d'hier !
Dès les années cinquante, la
plupart des grands pays
industrialisés ont lancé des
politiques éducatives promouvant
l'usage des "technologies nouvelles" et,
en premier lieu, les moyens audiovisuels
d'enseignement. Des développements
se sont produits, dès le
début des années soixante,
notamment dans le domaine de la
télévision scolaire, au
moment où les systèmes
éducatifs étaient
confrontés à la
massification des effectifs, et où
la rationalisation de l'enseignement par
des dispositifs techniques (moyens
d'enseignement, enseignement
assisté par ordinateur)
apparaissait comme possible.
Ensuite, à partir des
années soixante-dix et jusqu'au
plan "informatique pour tous" au milieu
des années quatre-vingt,
l'informatique a fait l'objet de
politiques volontaristes, avec, souvent,
des objectifs affichés de
rénovation des disciplines
scolaires. Depuis, le front de
l'innovation s'est déplacé :
les ordinateurs se sont banalisés,
sont devenus multimédias ; les
technologies de la communication, dont
Internet est actuellement le
représentant le plus en vogue, se
sont répandues.
Si l'École n'a inventé
aucun de ces outils, elle n'y est jamais
restée indifférente, et
s'est demandé avec plus ou moins de
bonheur, à chaque apparition d'une
nouvelle technologie, comment elle pouvait
la mettre à son service. À
chaque étape, la "nouvelle
technologie" a parcouru toutes les
hypothèses d'usage : auxiliaire
d'exposé au service des
enseignants, remplaçante du livre
ou du cours magistral pour dire le savoir,
répétiteur inlassable pour
exercices d'application, outil
d'apprentissage individualisé ou
à distance, voire d'autodidaxie,
offre d'apprentissage autosuffisant mis
à disposition de l'apprenantÉ et
toutes les combinatoires.
Les différentes études
conduites sur l'appropriation des
techniques par les éducateurs
marquent toutes fortement la lenteur de la
généralisation des usages,
comme si chaque fois, une innovation
chassant l'autre, celle qui apparaît
efface la mémoire des usages de la
précédente, et se
présente comme la formule-miracle
qui résout les difficultés
antérieures...L'héritage ne
se transmet que lentement, le transfert et
la traduction demandent du temps. Et
pourtant, les conditions ne sont plus ce
qu'elles étaient.
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du projet pédagogique à
l'usage de l'outil
En ce qui concerne les
équipements, en 1985, 5 % des
foyers étaient
équipés d'un ordinateur ; en
1997, l'Insee estime que suivant leur
milieu social, 40 à 70 % des jeunes
ont accès à un ordinateur.
En 1998, trois quart des stagiaires
sortant des instituts universitaires de
formation des maîtres (IUFM)
disposent d'un ordinateurÉ Les politiques
systématiques d'équipements
collectifs, de mise à disposition
de ressources diversifiées
(établissements de tous niveaux et
leurs centres d'information et de
documentation, partenariat avec des
collectivités territoriales ou des
associations) et de facilitation des
acquisitions personnelles portent leurs
fruits. Mais quel sens donner à ces
chiffres, sur la pratique effective des
technologies de l'information et de la
communication pour l'enseignement (Tice),
dans le milieu scolaire, tant les moyennes
ne rendent pas compte des lieux
d'implantation, des fréquences
d'utilisation, et des usages réels.
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Quant aux textes de programmes, ils
permettent pratiquement à toutes
les disciplines d'inclure, chacune avec sa
spécificité, les
technologies. Mais la liberté
qu'ils autorisent n'a pas toujours
été saisie et on ne peut pas
parler d'usage banalisé : ainsi, la
reconnaissance de l'image comme langage,
inscrite dans les programmes du
collège en 1985, a dû
être reproclamée aux
États généraux des
langages en 1999 ! Les
expérimentations conduites par des
acteurs de "terrain", nombreux dans ce
champ mais souvent isolés, les
recherches sur les apprentissages
menées par des équipes de
laboratoires universitaires, des IUFM, de
l'INRP, restent encore insuffisamment
nombreuses, pour apporter des
éléments qui renforcent les
adhésions souvent encore
"intuitives" des formateurs.
Et l'on peut comprendre que, dans
plusieurs plans de formation des IUFM, les
approches techniques restent la dominante,
sans doute renforcée par
l'accompagnement nécessaire des
plans d'équipement et
facilitée par la présence de
"jeunes docteurs". Or la question n'est
pas, comme le rappelait un collègue
formateur : « J'ai un ordinateur,
qu'est-ce que je vais faire avec ?
», mais « Qu'est-ce que je veux
faire ? Ai-je besoin d'un ordinateur pour
le faire ? » C'est le projet
pédagogique qui reste le garant
d'un usage pertinent des outils, et de la
hiérarchisation de leurs
utilisations.
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de la représentation à
l'esprit critique
La manipulation des ressources
audiovisuelles et informatiques demeure
une condition de leur transformation en
outils de travail pratiques et quotidiens,
et reste donc un souci légitime de
l'institution de formation. Mais les
dispositifs techniques complexes ne
s'intègrent pas spontanément
dans les pratiques éducatives. Si
l'on veut éviter la dérive
technologique, la formation doit se
centrer autour d'une réflexion sur
l'apport des technologies à une
construction des savoirs et aux pratiques
d'enseignement dans une logique de
construction de projet, tant dans des
modules spécifiques en formation
générale que dans les stages
de pratique accompagnée.
Enfin, quelle que soit la
qualité de cette réflexion
didactique, on ne saurait minimiser dans
la formation aux Tice la
nécessité du travail sur les
représentations tant des jeunes que
des enseignants, représentations
construites à partir des pratiques
réelles tout autant que des
opinions courantes du corps social.
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Toute pédagogie intégrant
les médias ne pourra
démontrer leur pertinence comme
outils d'apprentissage qu'à partir
du moment où les enseignants auront
opéré pour leur compte une
"conversion" au niveau de leurs
représentations, leur permettant de
se resituer de manière critique
dans le consensus social qui gouverne
l'usage des technologies.
Est-ce un hasard si l'éducation
aux médias (et son objectif de
formation à l'esprit critique) ne
tient plus la place qu'elle tenait il y a
quelques dix ans dans les modules de
formation ? La déferlante des jeux
vidéo, l'invasion du marché
par des images de toute nature, ne
posent-elles pas pour les
éducateurs les mêmes
questions que celles que pose, depuis plus
longtemps, la consommation de la
télévision par le jeune ?
Cette réflexion n'est-elle pas
l'une des composantes de
l'éducation à la
citoyenneté ? Ne risque-t-on pas
encore une fois, faute d'afficher
dès la formation même un
certain nombre de priorités, de
négliger des enjeux sociaux et
culturels essentiels ?
Le chantier de la formation reste
ouvertÉ
Annette Bon
Sommaire
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Quand des
élèves de segpa s'exercent
sur la toile...
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À la section
d'enseignement général et
professionnel adapté du
collège Maupassant, à
Limoges, tous les élèves
travaillent avec et sur les nouvelles
technologies de la communication. Non pas
que ce soit la panacée pour
répondre aux difficultés
scolaires, mais parce que ces outils font
partie de la vie.
|
A quelques jours du certificat de
formation générale, les
seize élèves de la 3e
section d'enseignement
général et professionnel
adapté (Segpa) envahissent la salle
informatique du collège Maupassant.
Huit postes de travail sont disponibles.
Certains vont donc s'asseoir à
l'écart pour d'ultimes
révisions ; ceux qui n'ont pas fini
leur rapport de stage s'installent devant
les écrans ; un petit groupe part
sur le web à la recherche d'un site
"moto" : Stéphane veut montrer
à l'enseignant son dernier coup de
cÏur. Et la salle ressemble vite à
une ruche. Démir prépare le
sommaire de son rapport de stage : frappe,
polices et formats, texte centré,
aligné ou en retrait. Son travail
prend forme petit à petit. Un
camarade vient l'aider, cherche avec elle
les stratégies de mise en page. Au
poste voisin, Cédric n'a plus
qu'à faire l'illustration de sa
couverture ; il a fait son stage dans une
boulangerie et cherche dans les stocks
d'images. Rien ne lui convient, il demande
alors au petit groupe de "surfeurs" s'ils
pourraient lui trouver quelque chose sur
le web. Chacun y va de sa proposition sur
les éventuels mots-clés
à utiliser : pain, boulanger,
métier ?
« Les nouvelles technologies ne
changent pas fondamentalement les
démarches d'apprentissage, explique
Rémy, instituteur à la
Segpa. Car si l'ordinateur constate
l'erreur, il ne l'analyse pas. Cela ne
dispense donc pas du travail
pédagogique d'explicitation. Il y a
un risque réel à contourner
les obstacles, en obtenant un
résultat satisfaisant sans pour
autant avoir construit de savoir
réutilisable. Mais les nouvelles
technologies font partie de la vie des
élèves. Il faut donc qu'ils
comprennent, exploitent les avantages,
maîtrisent les inconvénients.
Les avantages, c'est par exemple produire
de l'écrit propre, valorisant. On
travaille donc dès la 6e sur les
logiciels de bureautique, on fait des
affiches, des invitations.
|
susciter la motivation
C'est aussi créer du lien social
et pouvoir correspondre en temps
réel avec la Segpa de Rochefort,
comme le font les 5e.
L'inconvénient, ce serait
d'utiliser ces outils sans avoir de
réflexion sur ce qui se passe.
» Pour bien montrer que la magie
n'existe pas, Rémy organise des
ateliers bricolage : « on ouvre les
machines, et on démonte, on change
les cartes, on regarde tourner. »
Depuis cette année, vous pouvez
aller sur le site de la Segpa. Chaque
élève de 6e y a fait une
page où il se présente. En
utilisant les périphériques
de l'ordinateur, il a
intégré sa photo, et des
objets animés illustrant ses
centres d'intérêt. Le site ne
demande maintenant qu'à être
enrichi. « Comme pour toutes les
activités scolaires, précise
encore Rémy, il faut susciter et
relancer la motivation. Quel que soit
l'objet de production ou de recherche, la
démarche reste la même : Il
faut passer de l'objet au concept, trouver
des chemins d'accès,
procéder par hypothèses,
corrections, confrontationsÉOn travaille
sur ce qui les intéresse, musique,
cinéma, sport : les
élèves lisent et
écrivent alors d'autant plus que le
plaisir et l'envie sont là. »
Françoise Lebocey
|
Site
de la Segpa :
www.geocities.com/segpa_maupassant
Sommaire
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Pour une
réelle évolution du
métier de documentaliste
|
Les
travaux personnels encadrés et les
nouvelles technologies peuvent permettre
l'évolution du métier de
documentaliste.
Mais,
faute de créations de postes en
nombre suffisant, les élèves
et les personnels risquent de ne pas
bénéficier de cette
avancée.
|
La nouvelle technologie au service des
travaux personnels encadrés (TPE)
permettra-t-elle aux documentalistes de
mieux exercer leurs missions ?
Au lycée d'Auray qui comprend au
total huit cent cinquante
élèves, le centre de
documentation et d'information (CDI)
flambant neuf peut accueillir cent
quarante élèves par heure.
Les élèves y ont en
permanence à leur disposition
treize mille ouvrages, sept mille revues
référencées, onze
micro-ordinateurs (quinze à la
rentrée de septembre 2000)
reliés au réseau
d'établissement, des
cédéroms, un accès
à Internet en libre service et aux
ressources de l'Intranet ; des conditions
de travail vraiment enviables pour ce
centre de documentation et d'information.
Deux documentalistes (dont le service
est, pour l'une, de trente heures et, pour
l'autre, de quinze heures) sont
chargées de la politique
d'acquisition, de l'indexation et de
l'équipement des documents, du
prêt informatisé, de
l'accueil des élèves. Pas
d'aide-éducateur, de personnel en
contrat emploi solidarité, de
technicien informatique dans
l'établissement.
|
Les TPE, une chance ?
L'arrivée en 2000-2001 des TPE
en 1re devrait théoriquement
permettre de dépasser ces missions
de gestionnaire et de jouer enfin
pleinement le rôle de professeur,
officiellement reconnu depuis la
création du Capes de documentation.
Les textes officiels prévoient
en effet une coopération
étroite entre professeurs et
documentalistes : initiation à la
recherche documentaire dans la base de
données du CDI, utilisation des
moteurs de recherche sur Internet,
initiation aux techniques de consultation
des ouvrages de référence,
tri et validation de l'information,
classement et hiérarchisation des
documents, sélection de
l'information pertinente, rédaction
du carnet de bord, des notes,
élaboration de la bibliographie,
rédaction du produit final,
exposé oral, etc. Il semble
pourtant que la situation risque
d'être tout autre.
|
En effet, des choix vont devoir
être faits au sein de
l'établissement. Davantage
sollicitées par les
élèves et leurs professeurs,
les documentalistes vont devoir, faute de
création de postes, renoncer
à certaines taches sous peine de
dysfonctionnements au sein du CDI.
Comment co-animer les TPE (12 h
hebdomadaires pour les six classes), et
gérer en même temps les
soixante à cent autres
élèves présents dans
le CDI ainsi que le prêt des
documents ? Comment se placer en
médiateur de l'information, assurer
une mission d'ingénierie
éducative et de veille documentaire
sur Internet et régler au
même moment les pannes continuelles
des ordinateurs et des photocopieuses ?
Comment aider l'élève
à se familiariser avec l'outil
informatique et couvrir et indexer environ
mille livres par an ? Comment se concerter
avec les collègues et continuer
à animer des clubs de lecture,
à organiser des expositions,
à contacter des partenaires
culturels extérieurs ?
|
une occasion ratée ?
L'introduction des travaux personnels
encadrés pourrait permettre aux
documentalistes d'être acteurs de
cette innovation et de l'évolution
de leur métier. Mais beaucoup
craignent, parce que les tâches
incontournables sont incompressibles, que
leur rôle dans les travaux
personnels encadrés se limite
à un rôle de formateur de
collègues dans les techniques de
recherche et d'utilisation de
l'information, de rédacteur de
modes opératoires et de conseils
à l'intention des
élèves, et de gardien du
temple de la documentation.
|
Mais peut-être que les
conclusions de la première
année de fonctionnement qui en
seront tirées et l'extension des
des travaux personnels encadrés aux
classes de Terminale en 2001-2002,
amèneront-elles des
créations de postes de
documentalistes en nombre suffisant ?
C'est la condition nécessaire pour
que cette avancée profite
réellement aux documentalistes dans
l'exercice de leur métier.
Isabelle Panelay
Sommaire
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DES
ÉTUDIANTS EN LIGNE
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Pouvoir donner et suivre
un enseignement à distance,
grâce aux nouvelles technologies,
c'est ce qu'ont expérimenté
ensemble l'Insa de Lyon et des
étudiants de Grenoble. Récit
d'une démarche
exploratoire.
|
Les nouvelles technologies se moquent
des distances ! Ainsi, grâce
à Télésun, un projet
financé par la Communauté
européenne qui a pour objectif la
mise au point d'environnements de
télé-enseignement pour des
disciplines relevant majoritairement des
sciences de l'ingénieur, l'Institut
national des sciences appliquées
(Insa) de Lyon a développé
un environnement de
télé-enseignement du
traitement numérique d'images.
Et ce sont des étudiants de
maîtrise d'informatique de Grenoble
qui ont ainsi pu suivre un module de vingt
heures sans qu'aucun déplacement
n'ait lieu de part et d'autre. La
communication se faisait en temps
réel à travers le
réseau Internet (canal IRC
permettant d'échanger des messages
écrits à plusieurs, tableau
blanc permettant d'échanger des
dessins et courriers électroniques
classiques). L'interaction est donc
uniquement textuelle et graphique.
L'examen final a été
surveillé par un enseignant de
Grenoble (un examen direct sous Internet
sera prochainement disponible mais cela
pose de nombreux problèmes
liés à la
légalité d'une telle
procédure). Cet environnement a
également été
utilisé dans plusieurs
établissements d'enseignement
supérieur dont l'Insa de Lyon en
support de cours et de travaux pratiques.
Un enseignement d'un nouveau type
Bien sûr, il ne s'agit que d'une
expérience mais cela prouve que
dans certaines matières, les
nouvelles technologies permettent
d'accéder à de nouveaux
étudiants. Dans le cas
précis de Grenoble, le
déplacement de Lyon est
évidemment possible même si
cela induit un coût, surtout en
temps, non négligeable.
|
L'objectif était celui de la
faisabilité, le public visé
étant plutôt celui des
centres délocalisés en
France ou celui des pays en voie de
développement où il n'est
pas toujours possible de trouver ou de
faire venir un enseignant chercheur
spécialiste d'un domaine
donné. Rien n'empêche cet
enseignant de s'adresser lors d'une
même séance à des
étudiants situés en des
lieux différents.
Ce type de démarche demande
à progresser et a encore de
nombreuses limites. Elle s'adresse
à un petit groupe car cela
ressemble beaucoup plus à des
travaux pratiques qu'à un cours ;
le réseau informatique doit avoir
de bonnes capacités de
réponse ; le support papier devient
inutile car le cours est en constante
évolution et surtout son aspect
interactif ne peut pas être rendu
dans la structure d'un livre ; cette
absence perturbe beaucoup les
étudiants que le support papier
rassure (même s'ils ne l'ont jamais
regardé) ; enfin, l'interface
textuelle et graphique a, elle aussi, ses
propres limites (en regard d'une
communication orale et/ou visuelle) mais
vers la fin du cours, il semble que les
intervenants soient plus aptes à
communiquer avec ce nouveau type de
média, il s'agit donc plus d'un
problème de pratique que d'une
vraie limite.
Si ce type de démarche venait
à se développer, il faudrait
aussi penser à l'intégration
de cet enseignement non présenciel
dans le service statutaire des enseignants
chercheurs (pour le moment, la
participation des enseignants chercheurs
à cette expérience n'a
donné lieu à aucune
déclaration d'heures compte tenu de
l'aspect exploratoire de cette
démarche).
Jean-Michel Jolion
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Site
Internet : http://telesun.insa-lyon.fr
Sommaire
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UN
LYCÉE INFORMATISÉ
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Cartes et cartables
électroniques, le lycée
Charles-De-Gaulle de Muret, en
Haute-Garonne, s'est lancé dans
l'informatisation.
Effets de la
modernité sur la vie quotidienne
des enseignants et des
élèves en
lycée.
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Dès sa création il y a
une dizaine d'années, le
lycée Charles de Gaulle, à
Muret dans la banlieue de Toulouse, a
été informatisé.
Les élèves et les
personnels utilisent tous une carte
à puce sans contact personnelle
&endash; la carte Lycéoduc - pour
payer les repas à la cantine, faire
des photocopies, consommer à la
cafétéria et dans les
distributeurs de boissons, se connecter
sur le réseau pédagogique
grâce aux trois cents ordinateurs
environ installés dans le
lycée. Chaque membre du personnel,
chaque élève a un "cartable
électronique", c'est-à-dire
un espace disque réservé et
confidentiel.
Une charte de bon usage du
réseau et d'Internet a
été élaborée
et doit être signée par tous
les utilisateurs. Elle garantit le secret
et l'adhésion aux principes de la
Commission informatique et libertés
: une commission locale informatique et
liberté a été
créée.
La grande originalité de ce
lycée est de permettre
l'accès aux ressources
pédagogiques (logiciels,
cédérom, etc.) ainsi
qu'à d'autres informations plus
pratiques via un modem ou via n'importe
quel ordinateur dans
l'établissement.
travailler autrement
Les élèves peuvent
enregistrer leur travail grâce au
cartable électronique, travailler
en autonomie depuis leur domicile et
adresser leurs devoirs par messagerie aux
professeurs.
|
Même si de plus en plus
d'élèves possèdent un
ordinateur équipé de modem,
il reste à trouver des financements
pour pouvoir permettre à tous les
élèves de se connecter. Il
ne s'agit pas de cours virtuels ou de
professeurs virtuels : les nouvelles
technologies de l'information et de la
communication sont en complément
des pratiques pédagogiques
traditionnelles.
Quant aux enseignants, ils doivent
utiliser le réseau pour l'appel des
élèves et pour la saisie des
notes depuis les lieux de cours. À
la rentrée, il est prévu
d'expérimenter un cahier de texte
électronique.
La principale interrogation est la
gestion de ce système : la
présence d'enseignants à
temps partiel à côté
d'informaticiens est nécessaire.
N'importe quel enseignant peut être
muté dans ce lycée, il est
donc important que la formation à
l'utilisation des techniques de
l'information et de la communication pour
l'enseignement et d'Internet soit
organisée de façon
permanente. Tout un dispositif à
mettre en place pour en assurer la
continuité.
Patrick Salvadori
Sommaire
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L'ENSEIGNEMENT
ET LES MÉDIAS
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Pour Profession
Éducation, Alain Touraine analyse
l'effet de l'arrivée des nouvelles
technologies sur le rôle de
l'enseignant, « médiateur par
excellence ». Pour lui, ces nouvelles
techniques vont permettre d'enrichir
l'enseignement. Regard de
sociologue.
|
L'effet principal des médias de
tous les types est de dissocier les
messages de leur contexte social et
culturel, ce qui est à la fois
mauvais et bon. Mauvais, car cette
dissociation peut être artificielle
et introduire des interprétations
qui éliminent toute logique
sociale, au nom d'une lecture
émotionnelle et faussement
universaliste. Bon aussi, car ce mouvement
participe d'une tendance plus
générale de la
modernité qui élimine les
cadres et les normes sociaux au profit de
"l'individualisme moral" dont parlait
Kant, et plus concrètement d'une
prise en compte des
caractéristiques personnelles de
ceux à qui on adresse des messages.
Les médias n'ont d'effets que s'ils
sont relayés par des
médiateurs dans de petits groupes.
L'enseignant est le médiateur
par excellence. Son rôle n'est pas
diminué par les médias ; il
est modifié. Il est de remplacer
les connotations sociales et culturelles
des messages classiques par une
communication individualisée, par
la prise en compte à la fois de la
généralité du message
et de la particularité de sa
réception par chaque
élève ou étudiant. Il
n'y a aucun paradoxe à dire que le
recours aux médias individualise la
communication.
Mais cette nouvelle forme
d'enseignement est en effet bien
différente de celles dont nous
avons l'habitude et qui cherchent à
dégager l'élève de
son milieu particulier pour le mettre en
rapport aussi directement que possible
avec des valeurs universelles, et en
premier lieu avec la connaissance
scientifique et avec de grandes Ïuvres
culturelles ayant atteint une
reconnaissance sinon universelle, du moins
très large.
Il existe un danger dans l'emploi des
multimédias : céder aux
plaisirs et aux difficultés de
l'instrumentalité ; mais il n'est
pas pire que celui des méthodes
traditionnelles qui sont très
instrumentales, par exemple dans
l'étude des langues où
l'apprentissage de la grammaire fait
souvent écran à la rencontre
d'un texte.
Inversement, l'enseignant est
amené, par l'emploi des
médias, à reconnaître
la diversité des démarches
qui peuvent conduire au même
résultat ou au même but. Le
recours aux nouvelles technologies
diversifie les modes de transmission des
messages ; il ne massifie pas la
communication ; au contraire, il
l'individualise, du simple fait que la
participation de chacun est plus active.
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L'enseignement devient alors
communication et non plus initiation. Il
ne place plus l'élève devant
les statues des grands textes ou des
grandes lois scientifiques. Il lui fait de
mieux en mieux comprendre le processus des
connaissances qui mène à
atteindre aussi bien des résultats
scientifiques que le savoir des sciences
humaines ou celui des "sciences de
l'esprit", pour garder la tradition
allemande de distinction de trois types
principaux de connaissances.
Il n'y a aucune raison de penser que
l'utilisation des nouvelles techniques
diminue la place de la connaissance et de
l'apprentissage dans l'enseignement, comme
s'il s'agissait de remplacer la
mémorisation par le jeu, deux
solutions également mauvaises.
De nouveaux langages doivent servir
à transmettre non seulement de
nouvelles connaissances mais surtout le
processus d'acquisition de ces
connaissances. Il s'agit simplement de
renforcer la part des "travaux
dirigés" par rapport au cours
magistral dans l'enseignement. Ce qui doit
élargir la participation active des
élèves : au lieu
d'écouter, ils construisent une
démarche de connaissances. Souvent
même, y compris dans l'enseignement
à distance, les
élèves ou étudiants
communiquent entre eux, se rencontrent
même, et l'enseignant a plus de
rapport personnalisé avec les
élèves
éloignés que dans la classe
traditionnelle. Il ne faut surtout pas
opposer le face-à-face, qui se
réduit souvent à
l'écoute passive, à l'emploi
de techniques qui semblent faire
écran à ce
face-à-face et qui le plus souvent
font appel à des conduites plus
actives.
Alain Touraine
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